FRANCE-ALLEMAGNELes 4 priorités du couple franco-allemand : la dette, la productivité industrielle, l’immigration et la gouvernance de BruxellesCette réunion n’est pas seulement un retour aux ambitions des pères fondateurs de l’Europe, mais une tentative de réinventer un partenariat stratégique dans un monde profondément transformé.
Un contexte géopolitique bouleversé :
La guerre en Ukraine a profondément remis en question la sécurité européenne. Elle a révélé la fragilité des mécanismes de défense collective et l’urgence pour les États membres de l’UE de renforcer leur autonomie stratégique. Parallèlement, les déclarations et actions de figures politiques comme Donald Trump, avec ses menaces de retrait de l’OTAN et ses critiques envers l’engagement américain en Europe, ont accentué un sentiment d’abandon et la nécessité pour l’Europe de prendre en main sa propre défense.
Cette nouvelle donne impose au couple franco-allemand un rôle pivot : non seulement en tant que moteur économique, mais aussi en tant que garant de la stabilité politique et militaire du continent.
Une asymétrie économique et politique à surmonter
Le couple franco-allemand est aujourd’hui déséquilibré sur plusieurs plans.
L’Allemagne, traditionnellement moteur économique de l’Europe, est confrontée à une crise structurelle profonde . Sa dépendance énergétique, notamment au gaz russe, a été brutalement remise en cause, ce qui a fragilisé son modèle industriel basé sur des coûts compétitifs. Par ailleurs, l’incapacité à diversifier ses marchés, notamment face à la fermeture du marché chinois, et la montée de l’extrême droite (AfD) fragilisent la stabilité politique et la cohésion sociale.
De son côté, la France fait face à des défis différents mais tout aussi graves. Si elle n’est pas en récession, elle est confrontée à un déficit public élevé et à un système de protection sociale coûteux qui pèse sur sa compétitivité. La nécessité d’une réforme profonde de l’État-providence se heurte à une opinion publique souvent réticente, ce qui rend toute politique d’austérité ou de réduction des dépenses politiquement risquée. Le déficit de compétitivité française, notamment industriel, est un frein à la croissance et à la création d’emplois durables.
La dette francaise peut servir de point de convergence et de tension
Cette question de la dette française est au cœur des négociations. L’Allemagne, historiquement attachée à la rigueur budgétaire et aux règles strictes de Maastricht, est désormais confrontée à un dilemme : soutenir la France pour préserver l’équilibre européen ou maintenir une ligne dure qui pourrait fragiliser l’Union. Ce changement d’attitude est en partie motivé par la nécessité d’un effort militaire commun face à la menace russe, mais aussi par la prise de conscience que le modèle économique allemand ne peut plus porter seul l’Europe.
La productivité et l’innovation sont desormais consideres comme des leviers indispensables
L’amélioration de la productivité industrielle est un enjeu majeur pour redonner de la compétitivité à l’Europe face aux États-Unis et à la Chine. Cela passe par une modernisation des infrastructures, un investissement massif dans la recherche et le développement, ainsi qu’une transition énergétique ambitieuse vers des technologies plus propres et souveraines. Le couple franco-allemand doit impulser une stratégie commune d’innovation, en particulier dans les secteurs clés comme les énergies renouvelables, la mobilité durable, et le numérique.
L’immigration, un défi social et politique En France comme en Allemagne
L’immigration reste un sujet sensible, souvent source de tensions internes et de fractures politiques. La gestion des flux migratoires, l’intégration des populations, et la lutte contre les discriminations sont des défis auxquels la France et l’Allemagne doivent répondre de manière coordonnée. Une politique commune européenne, équilibrée entre humanité et sécurité, est essentielle pour éviter des dérives nationalistes et préserver la cohésion sociale.
Enfin, la gouvernance européenne, perçue comme trop bureaucratique et lourde, est un frein à l’efficacité et à la légitimité de l’Union. Le couple franco-allemand doit impulser une réforme institutionnelle pour simplifier les processus décisionnels, renforcer la transparence, et rapprocher les institutions des citoyens. Cela passe aussi par une meilleure répartition des compétences entre l’UE et les États membres, en tenant compte des spécificités nationales tout en renforçant l’intégration sur les dossiers stratégiques.
L’enjeu pour le couple franco-allemand est donc de dépasser leurs divergences historiques, et culturelles pour construire une nouvelle alliance fondée sur la complémentarité. L’Allemagne apporte son poids économique et son savoir-faire industriel, tandis que la France peut jouer un rôle moteur sur le plan politique et diplomatique. Ensemble, ils doivent redonner à l’Europe une vision commune, capable de répondre aux défis du XXIe siècle.
Cependant, cette ambition se heurte à des réalités politiques internes complexes : la faiblesse des majorités parlementaires en France et en Allemagne limite la capacité à mener des réformes audacieuses. De plus, les divergences au sein même de l’Union européenne, entre pays du Nord et du Sud, compliquent la recherche d’un consensus.
Le couple franco-allemand est donc à un tournant décisif. Pour que l’Union européenne retrouve son dynamisme et son influence, il doit s’engager dans un partenariat renouvelé, fondé sur la solidarité, la responsabilité partagée et une vision stratégique à long terme. Cela implique des compromis difficiles, une volonté politique forte, et une capacité à mobiliser les citoyens autour d’un projet européen ambitieux et inclusif.
il y a 11 heures